mercredi 1 juillet 2009

Absentéisme enseignant : publiez les vrais chiffres !

L'annonce faite par RTL, reprise ensuite par tous les médias, validée par les propos de Luc Chatel, d'une étude ministérielle qui estimerait qu'un enseignant du primaire sur deux a bénéficié d'un congé de maladie en 2008 est-elle un bidonnage ? Trois éléments penchent en ce sens.

Le doute le plus sérieux vient du fait que l'étude reste mystérieuse, RTL ne l'a toujours pas publiée. On n'a donc aucune idée de ce qui a été vraiment décompté et du sérieux de cette enquête. D'autres éléments de doute viennent de l'incohérence entre les chiffres avancés et d'autres données officielles. L'Expresso avait évoqué le rapport sur les performances du ministère. Mais d'autres rapports contredisent les affirmations de RTL. D'abord un intéressant travail de l'Insee sur les congés maladie et accidents dans l'économie française qui établit une loi : "plus le travail est qualifié, moins on s'absente pour cause de maladie ou d'accident". Cette étude fixait un taux moyen d'absence des enseignants à 1,7% pour le primaire et 1,5% pour le secondaire, loin derrière la plupart des professions, par exemple les employés de commerce (3), les ouvriers non qualifiés de l'industrie (4,3). Seuls les ingénieurs et cadres du privé et les cadres de la fonction publique font mieux. Cette étude a 10 ans d'âge (1998) mais, si les chiffres ont pu évoluer, la logique qui les anime est sûrement encore à l'oeuvre.

Mais il y a des données beaucoup plus récentes. En présentant la carte scolaire 2009, le ministère a lâché quelques chiffres, preuve s'il en était qu'il les détient. Concernant les enseignants du primaire, la Dgesco affirme que "on constate que sur 10 ans le taux d'absence a augmenté au niveau national 5,98 en 1998-1999 et 7,23% en 2006-2007". Que le taux d'absence ait augmenté n'est pas très étonnant compte tenu du vieillissement de la population enseignante (moyenne d'âge 40 ans). Encore faut-il préciser qu'il concerne tous les motifs d'absence (pas seulement la maladie et on a vu dans le rapport de performance que les motifs administratifs pèsent plus lourds que la maladie). Il s'établit à environ 7% des heures enseignées. Comment avec 7% d'heures avoir "la moitié d"enseignants absentéistes" ??? Précisons quand même que ce taux est très variable d'un département à l'autre, avec parfois des facteurs évidents (on a plus d'absents dans les zones difficiles), parfois non… Enfin rappelons que le temps de travail des enseignants du second degré a été évalué par la DEPP (ministère) en 2002 : il s'établit à 39h47 en moyenne par semaine.

De ces données il ressort quatre constats. Le premier c'est que les enseignants n'ont globalement pas à rougir. Le second c'est que quand un prof est absent c'est une gêne bien réelle pour les familles. La question mérite sans doute mieux qu'une campagne assez basse, des solutions concrètes. Or là-dessus les derniers chiffres du rapport de performances montre que les résultats de Xavier Darcos sont mauvais. Les économies ont touché également le volant de remplaçants et ce ne sont pas leçons de morale qui vont les ressusciter…

Le troisième constat c'est que les vrais chiffres existent. Ils ont servi à la Dgesco pour établir sa carte scolaire. On peut les compléter avec le suivi détaillé des absences maladies et maternité qui a été lancé en 2004 par le Comité d'hygiène et de sécurité du ministère. Qu'attend la Dgesco pour les publier ?

Le dernier constat interpelle directement le ministre. En 1999 Claude Allègre avait fait campagne sur l'absentéisme des enseignants en avançant, par une entourloupe, 12% d'absentéistes. Voilà ce thème revenu à la Une médiatique avec, encore mieux, un prof feignant sur deux. Ou ces chiffres viennent de la rue de Grenelle, ou ils sont bidons. Il appartient au ministre soit de les confirmer, soit de les démentir, soit d'accepter d'avoir précocement la popularité du ministre précédemment cité.

sources : café péda

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