vendredi 8 mai 2009

Les « désobéisseurs » toujours là

Troisième journée de mobilisation, hier, de ce collectif qui rassemble près de 2 800 enseignants refusant d’appliquer les réformes Darcos.

Les sanctions et les menaces n’y auront rien changé. Six mois après le début du mouvement, le nombre d’enseignants « désobéisseurs » continue de grimper parmi les professeurs des écoles. Selon leur propre décompte, ils étaient « 2 747 » le 4 avril à avoir signifié publiquement, par un courrier envoyé à l’inspecteur d’académie, leur refus d’appliquer les réformes de Xavier Darcos. Hier, ce collectif, fédéré via Internet (1), a organisé sa troisième « Journée nationale de la désobéissance ». Au programme : pique-niques, conférences de presse et, bien sûr, nouveaux dépôts de lettres. Un espoir aussi. Dépasser la barre symbolique des 3 000 désobéisseurs.

« Ça ne faiblit pas, assure Alain Refalo, l’un des initiateurs du mouvement. Et pourtant le ministère ne se prive pas de sanctionner durement ces enseignants récalcitrants. » Ils sont actuellement une cinquantaine à subir des retraits de salaire carabinés. Selon les académies, cela peut aller de un à… dix jours par mois ! « En ce qui me concerne, explique Alain Refalo, je perds deux jours de salaire par semaine, simplement parce que je n’applique pas les deux heures quotidiennes d’aide personnalisée. » L’argent, nerf de la guerre. Mais pas question de se laisser intimider. Pour tenir le coup, les désobéisseurs ont mis en place une « caisse de solidarité », abondée par les dons d’autres enseignants, qui les soutiennent officieusement, et de quelques parents d’élèves.

Cette année écoulée n’a pas atténué les critiques des désobéisseurs, qui dénoncent les multiples attaques contre l’école publique. Pêle-mêle : le démantèlement des réseaux d’aides spécialisées aux enfants en difficulté (RASED), le fichier Base élèves, l’instauration des deux heures hebdomadaires d’aide personnalisée et de la semaine de quatre jours. « On a surchargé les journées pour les écoliers en difficulté, s’agace ainsi Sébastien, un instituteur de Charente. Dans le même temps, la France est devenue le pays européen où le nombre de jours d’école est le plus faible : 139 contre 188 en Finlande. » Conséquence : les professeurs des écoles peinent à boucler les nouveaux programmes, alourdis et jugés, par beaucoup, trop « passéistes ». Comme d’autres enseignants désobéisseurs, Sébastien continue, vaille que vaille, de travailler sur les bases des programmes de 2002. « Eux mettent les enfants en situation de recherche, insiste-t-il. Ils sont acteurs et non pas juste receveurs. »

Autant de critiques que partage Alain Refalo qui se sent conforté dans ses revendications. « Même les collègues qui étaient pour l’aide personnalisée constatent qu’elle est peu efficace, assure-t-il. Ils comprennent que ce n’est que de l’affichage. » Pour autant, comment peut évoluer le mouvement des désobéisseurs, qui s’écartent des formes traditionnelles de revendications et n’a pas le soutien officiel des syndicats ? Alain Refalo se dit optimiste. « La désobéissance est une alternative efficace à la grève. Nous savons que nous n’aurons pas de résultats immédiats, mais nous sommes prêts à nous installer dans la durée. »

(1)http://resistancepe dagogique. blog4ever. com/blog/

Laurent Mouloud, pour l'humanité

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