vendredi 8 mai 2009

qu'est-ce que Base Eleves ????

Les fichiers de l’Éducation nationale, par Stéphanie Pouget
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> article de la rubrique Big Brother > le ministère de l’EN et les
> fichiers
> date de publication : lundi 4 mai 2009
>
>
> L’arrêté concernant Base Elèves (BE) a supprimé plusieurs champs
> d’information. A cette occasion, on a pu entendre crier victoire,
> considérant que le problème était résolu. Or BE n’est qu’un élément
> d’un système de fichage et profilage des élèves et étudiants.
> L’arrêté n’a rien changé aux finalités de ce système. Aussi peut-on
> légitimement estimer qu’il n’était qu’un leurre destiné à désarmer la
> contestation, et l’on peut également s’attendre à voir réapparaître,
> sous la forme d’autres fichiers, les informations supprimées – ainsi
> a-t-on récemment vu apparaître un fichier sur le retard scolaire, et,
> dans certains départements, il a été demandé aux directeurs d’écoles
> de faire remonter des listes nominatives d’enfants nécessitant des
> suivis spécifiques comme le RASED.
>
> Dans son intervention le 25 avril dernier, lors de la seconde journée
> nationale de rencontre organisée à Valence par le CNRBE, Stéphanie
> Pouget, militante de la LDH contre Base élèves, avait passé en revue
> les différents dispositifs informatiques mis en place dans le système
> éducatif. Nous reprenons son intervention.
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>
> Sconet
>
> En tout premier lieu, on se doit d’évoquer la base de données Sconet.
> Elle est l’équivalent de BE en collèges et lycées. Créée en 1995 par
> un arrêté, elle s’appelait alors Scolarité. Elle a été modifiée à
> plusieurs reprises et aujourd’hui, dans sa version minimale, elle est
> très proche de ce qu’était BE avant l’arrêté et avant la suppression
> du champ nationalité. Les données nominatives sont transférées hors
> de l’établissement, dans une base de données académiques. Une
> proportion infime de parents connaît l’existence de Sconet, et sait
> que les données nominatives sont diffusées hors de l’établissement,
> aucune information à ce sujet n’étant fournie par les établissements
> scolaires. On peut espérer que les parents d’enfants scolarisés en
> primaire et sensibilisés au problème que représente BE
> s’intéresseront naturellement à Sconet à l’occasion du passage de
> leurs enfants dans le secondaire.
>
> L’Identifiant National Elève (INE)
>
> Un identifiant élève qui suscite de nombreuses interrogations, mais
> qui existait à l’origine dans Scolarité. C’est à l’occasion d’une
> modification de Sconet effectuée en 2002 que lui a été attribué le
> nom d’INE. Mais l’INE d’alors n’était pas celui que l’on connaît
> aujourd’hui. En effet, son attribution n’était pas centralisée au
> niveau national et de nombreux doublons existaient. Le Ministère de
> l’Education Nationale (MEN) a saisi l’occasion de la mise en place de
> Base Elèves pour passer à une attribution centralisée par
> l’intermédiaire d’une base de données des identifiants élèves, la
> BNIE (Base Nationale des Identifiants Elèves).Comment cela se passe-t-
> il aujourd’hui ?
>
> Lorsqu’un enfant s’inscrit dans une école, le directeur entre ses
> données dans BE. Une connexion automatique à la BNIE attribue un INE
> à l’enfant s’il n’en avait pas encore. La BNIE renferme des
> informations d’état civil ainsi que l’historique des écoles
> fréquentées. Elle est mise à jour régulièrement par connexion aux
> bases élèves académiques.
>
> Comment le MEN justifie-t-il l’utilisation de l’INE ? Il invoque
> d’une part la nécessité d’avoir un meilleur contrôle des effectifs,
> et d’autre part celle de pouvoir suivre les parcours scolaires
> complets de tous les enfants dans le but de réaliser des études
> statistiques.
>
> On ne peut que souligner la légèreté avec laquelle a été mis en place
> un identifiant national qui concerne une grande partie de la
> population, les données étant conservées pendant 35 ans…Concernant
> les effectifs, on ne peut qu’être choqué par la disproportion entre
> finalité et moyens mis en œuvre. Enfin, il est légitime de se
> demander pourquoi un tel besoin de données exhaustives pour des
> études statistiques ; pourquoi ne pourraient-elles pas être réalisées
> à partir d’ échantillons de population ?
>
> L’INE est très problématique pour l’accueil à l’école des enfants de
> familles sans papier. En effet, si un enfant arrive en école
> élémentaire par exemple, le directeur l’inscrit dans BE ; lors de la
> connexion à la BNIE il est automatiquement repéré comme n’ayant pas
> d’INE, et son cas doit alors être traîté par l’administration…
>
> Dans le contexte actuel de multiplication des fichiers administratifs
> qui accompagne une volonté de profilages des individus, on peut
> également craindre de futures interconnexions rendues possibles par
> l’existence de cet identifiant.
>
> Les Environnements numériques de travail (ENT)
>
> Il s’agit là d’un dispositif en plein développement et fortement
> soutenu par le MEN.
>
> L’ENT est un portail sur Internet qui rassemble de nombreuses
> informations relatives à la scolarité de l’élève (cantine, absences,
> mais également notes, appréciations …). Ces informations, protégées
> par un mot de passe, sont accessibles à des degrés divers aux
> différents acteurs de l’éducation de l’enfant, administration,
> enseignants, parents. Un arrêté relatif aux ENT est paru en 2006, et
> la CNIL a rendu un avis dans lequel elle souligne l’importance de la
> sécurisation des données. Quel est le lien avec les bases de données
> élèves ? Sconet, que nous avons déjà présenté, permet une
> centralisation de toutes les données intéressant la scolarité entière
> de l’élève, depuis des données familiales jusqu’à l’enregistrement de
> ses résultats et de sa conduite. Cette base de données est d’ores et
> déjà interfacée avec les ENT, de sorte que toute information fournie
> par les professeurs et les administrations vient alimenter le dossier
> individuel de l’élève.
>
> Les ENT s’inscrivent dans le cadre du développement des TICE
> (Technologies de l’Information et de la Communication pour
> l’Education) dans l’Education Nationale. Ils sont présentés comme un
> outil moderne et essentiel favorisant l’implication des parents dans
> la scolarité de leur enfant. Plusieurs études récentes se sont
> intéressées aux conséquences importantes et pour certaines
> problématiques de l’introduction d’un tel outil. Ainsi apparaît-il
> par exemple que l’implication accrue des parents se limite bien
> souvent à l’utilisation de l’ENT comme moyen de contrôle des enfants,
> ce qui ne peut en aucun cas se substituer à une nécessaire relation
> de confiance et de dialogue.
>
> Un élément des ENT est le livret de l’élève qui rassemble les notes
> et compétences validées par l’élève. Il était prévu (jusqu’à l’arrêté
> BE) qu’il soit alimenté par les bases de données BE et Sconet
> (rappelons que la version initiale de BE comprenait la validation des
> compétences du socle commun). Ce livret doit suivre l’élève tout au
> long de sa scolarité et même au-delà. En effet ce livret de
> compétences, également appelé portfolio numérique, est conçu pour
> suivre la personne tout au long de sa vie professionnelle,
> enregistrant les compétences validées dans le système éducatif mais
> également après, dans le cadre de formations spécifiques.
>
> Le portfolio est présenté comme un outil essentiel dans une société
> moderne reposant sur le savoir. Plus prosaïquement, sur les sites des
> entreprises qui commercialisent les logiciels de gestion de portfolio
> on peut lire des termes comme employabilité, adaptabilité… Fortement
> soutenu au niveau européen mais également adopté dans des pays comme
> l’Australie, il met en évidence le rôle que nos sociétés veulent
> attribuer à l’éducation, celui d’un outil de production d’une main
> d’œuvre mobile, adaptée au marché du travail.
>
> Pour conclure, on peut souligner le fait que le développement de
> l’utilisation des fichiers dans l’Education Nationale se trouve à la
> convergence de deux tendances actuelles, la première consistant à
> ficher à tout va, dans le but de pouvoir détecter le plus tôt
> possible les personnes susceptibles de poser des problèmes à la
> société, les comportements déviants, et la seconde tendant à
> considérer principalement l’Education selon des critères de
> rentabilité économique.
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> Stéphanie Pouget

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