dimanche 22 février 2009

Former des fonctionnaires coûte trop cher à l'Etat, le gouvernement refléchit

AFP Luc OLINGA

Les 169 écoles de la Fonction publique, qui forment magistrats, militaires ou ingénieurs sont accusées de reproduire les élites et de coûter trop cher à l'Etat dans un rapport préconisant une réduction de leur nombre et dont le gouvernement s'est distancié vendredi.

Le document de plus de 200 pages a été remis au ministre de la Fonction publique Eric Woerth lundi par son auteur Raymond-Franç ois Le Bris, ancien directeur de l'ENA.

La formation des fonctionnaires est trop longue, "pas suffisamment professionnalisé e", "mal organisée", avec 169 écoles (Police, Impôts, Douanes, Ingénieurs, Santé, Magistrature, Défense, Culture, Diplomatie, hors IUFM) réparties dans 99 villes, employant 50.000 personnes pour "près de 2,5 milliards d'euros" par an. Système jugé très coûteux par le rapporteur.

Ce qui, selon le rapporteur, pose "évidemment la question de la rationalisation de ce réseau".

M. Le Bris plaide pour un raccourcissement de la durée de la formation et une réduction du nombre des écoles, via le regroupement de certaines d'entre elles en "centres d'initiation et de perfectionnement professionnelle" . Il cite l'exemple de la gendarmerie où 4 écoles vont être supprimées (Montargis, Le Mans, Châtellerault, Libourne) suite à un rapprochement de huit autres.

Le ministère de la Fonction publique, qui entame lundi une semaine de discussions bilatérales délicates avec les syndicats, a immédiatement pris ses distances.

Ce rapport "n'engage à ce stade que son auteur", a fait savoir M. Woerth via son service de presse, ajoutant qu'il "réfléchit de son côté et arrêtera prochainement ses mesures pour améliorer la formation des agents de l'Etat".

Déjà remontés contre la suppression prévue de 30.000 emplois en 2009, conséquence du non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, mesure phare de la réforme de l'Etat en cours, les syndicats ont critiqué les conclusions du rapport, qu'ils disent ne pas avoir reçu.

"On aurait pu donner les conclusions avant que le rapport ne soit écrit", ironise Eric Benel (Solidaires, qui réunit Sud). "C'est dans la droite ligne de ce qui se fait depuis deux ans: réduire, réduire, réduire les effectifs", décrie-t-il.

Pour Anne Balthazar (FO), le gouvernement entend faire des "économies budgétaires en s'en prenant aux concours d'entrée. Pour cela, il veut que les jeunes payent eux-mêmes leur formation et se présentent aux concours en étant déjà formés".

"C'est une vision un peu étroite de la formation", ajoute Gérard Aschieri (FSU). "Ce n'est qu'un élément, qui doit servir de base à une réflexion conduite avec les organisations syndicales", prévient Brigitte Jumel (CFDT).

Au-delà du coût de la formation, le rapport Le Bris s'attaque aux écoles "emblématiques" (ENA, Polytechnique et Ecoles Normales Supérieures), traditionnel ascenseur social. Il les accuse de ne pas se renouveler et de reproduire les mêmes élites sociales.

Pour favoriser la diversité, il préconise de créer un contrat d'apprentissage afin de "permettre à des jeunes d'âge scolaire de connaître une première expérience professionnelle" dans l'une des trois branches de la Fonction publique (Etat, hospitalière, territoriale) .

S'il partage l'analyse, M. Aschieri plaide plutôt pour des "pré-recrutements" : l'Etat financerait les études de jeunes issus de milieux ou de quartiers défavorisés en contrepartie de leur engagement à le servir.

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